27 Décembre 2023
« Les saisons » un ballet chorégraphié par Thierry Malandain sur la scène du théâtre de La gare du midi, ou quand le sublime rencontre l’excellence.
Un ballet commandé par l’Opéra royal de Versailles et créé le 25 novembre dernier au palais des festivals de Cannes. Le Malandain ballet biarritz se produit pour la première fois sur sa terre natale avec cette sublime évocation des quatre saisons d’Antonio Vivaldi entrecoupées par celles de Giovanni Antonio Guido. Un ballet audacieux qui donne le frisson, celui du plaisir.
Guido ? Mais quel est ce musicien dont la plupart d’entre nous n’a jamais entendu parler ? Un contemporain de Vivaldi qui fut sous la protection du duc Philippe d’Orléans, futur régent passionné par la musique. C’est sous le nom de Scherzi armonici sopra le Quattro stagioni dell’anno – Les quatre saisons de l’année que furent créées ces saisons à l’occasion d’une commande de Pierre Crozat pour rénover sa salle à manger mise en beauté par Jean-Antoine Watteau. Une musique qui contraste avec celle de Vivaldi.
Des saisons qui n’ont d’un premier abord pas retenu l’attention de Thierry Malandain mais celle de Laurent Brunner, directeur du Château de Versailles spectacles et de Stefan Plewniak.
Des saisons qui ne sont pas sans rappeler le changement climatique que nous vivons, subissons, aujourd’hui avec ses dysfonctionnements qui influent sur nos comportements, dans une continuité qui s’annonce dévastatrice. C’est dans une scénographie transcendante, sombre, noire, de Jorge Gallardo que les danseurs évoluent sur le plateau narrant ces saisons qui se suivent et ne se ressemblent pas, mais se prolongent, se nourrissent. Des murs remplis de pétales noirs qui auront l’audace de se prolonger sur les bras des danseurs, narguant cette nature capricieuse. Guido viendra donner un peu de lumière dans ses dissonances envoûtantes avec ces costumes colorés de Jorge Gallardo. Un ensemble harmonieux aux reflets d’une légèreté déconcertante qui laisse place à la danse dans son éclat fantaisiste à l’humanité révélatrice d’une conscience chamboulée, telle que la galerie des glaces du Château de Versailles peut le promouvoir.
Un lever du soleil de cette saison du printemps vient nous embarquer dans un rêve éveillé, mêlant le sublime à l’excellence avec ces danseurs à la grâce innée. Dans une chorégraphie à l’innovation sans limites, au graphisme étourdissant, marque de fabrique de Thierry Malandain, nous sommes éblouis par tant de générosité, de finesse d’exécution. Les notes s’envolent, virevoltent, avec les pas des danseurs heureux de nous conter leurs saisons sur des traditions musicales qui s’opposent, se complètent : Vivaldi et Guido au sommet de leur art.
Le génie de Thierry Malandain, musicien de la soirée, est d’avoir entrecoupé les saisons de Vivaldi avec celles de Guido par la lumière des costumes & celles de François Menou, et le point de liaison par les solos, les pas survoltés du charismatique Hugo Layer, à l’agilité charmeuse d’un félin à la présence captivante ; des sauts démesurés parfois prolongés par ces pétales qui au bout de ses mains donnent de la puissance à son récit, telles des ailes qui se déploient et s’envolent vers un horizon vivifiant.
Quatre saisons et quatre saisons dans un dialogue constant qui passent à une vitesse folle, tel un train à grande vitesse qui siffle dans la nuit froide de l’hiver pour se réveiller dans un soleil de printemps annonçant un été très chaud. Des saisons nous laissant subjugués par tant de beauté dans ces rondes endiablées, ces portés prolongés par ces jetés, ces pas de deux, de trois…à la fois mélancoliques, entreprenants et téméraires, où l’émotion d’une position, d’un geste n’est jamais très loin pour nous surprendre dans ce noble dialogue entre la musique et la danse.
Un ballet, une ode à la nature, interprété par les virtuoses du Malandain ballet biarritz, à la renommée internationale : Noé Ballot, Giuditta Banchetti, Julie Bruneau, Raphaël Canet, Clémence Chevillotte, Mickaël Conte, Loan Frantz, Irma Hoffren, Guillaume Lillo, Claire Lonchampt, Timothée Mahut, Alessia Peschiulli, Julen Rodríguez Flores, Alejandro Sánchez Bretones, Ismael Turel Yagüe, Yui Uwaha, Chelsey Van Belle, Patricia Velazquez, Allegra Vianello, Laurine Viel et Léo Wanner.
« Les saisons » sur la scène du théâtre La gare du midi par le Malandain ballet biarritz, représentations supplémentaires les 28, 29 et 30 décembre à 20h30. Puis les 19 et 20 janvier 2024 à Bilbao, les 08 et 09 mars 2024 à Pampelune…et retour à La gare du midi les 07, 08 et 09 août 2024. Vues le 271223